« Il y avait une très forte attente sur la question du recyclage des déchets alimentaires » explique Hélène Pecoil. Cet accueil chaleureux des professionnels rennais réjouit la cofondatrice de Rennes du Compost. Elle et ses deux ex-collègues Sophie Gimenez et Amel M’Sadek ont lancé leur entreprise en mai 2021 et enregistrent pas mal de kilomètres au compteur depuis, et de déchets : « Nous avons déjà collecté 5 tonnes de biodéchets depuis mai 2021 et nos premiers lots de composts sont prêts ! ».
Rennaises, les trois amies évoluaient dans le domaine de la santé. Hélène et Amel en tant qu’infirmières en cancérologie et Sophie comme qu’attachée de recherche clinique en biologie médicale. « Nous souhaitions élargir le ‘prendre soin’ des personnes au vivant et à l’environnement en général, et également intervenir plus tôt, par la prévention, la sensibilisation » raconte Hélène.
Un service tout-en-un aux multiples avantages
Restaurants, bars, épiceries, hôtels, boulangeries, fleuristes, écoles, entreprises privées…. Les trois amies proposent aux professionnels rennais la collecte des déchets organiques en vélo-remorque, via un système d’abonnement de 1 à 4 passages par semaine selon la formule choisie. Pour ce faire, elles mettent à disposition des bacs propres et récupèrent en échange, à chaque passage, les bacs remplis de biodéchets. « Dans le centre-ville, même si Rennes Métropole proposent des solutions, tous les professionnels n’ont pas forcément la place de mettre de grandes poubelles et certains ont besoin de plus d’un passage par semaine. Nos contenants sont refermables et ont une capacité de 25 à 50 litres, ils peuvent donc être entreposés dans les cuisines ou dans des petites zones de stockage » explique Sophie Gimenez.
Mais les professionnels sont-ils prêts à payer un abonnement, alors qu’ils versent déjà une taxe pour les ordures ménagères ? Oui, car ils y trouvent de multiples bénéfices explique Hélène Pécoil : « la loi de Transition Énergétique pour la Croissance Verte va imposer à tous, d’ici fin 2023-2024, de trouver une solution pour trier à la source et valoriser ses biodéchets. Avec Rennes du Compost, on peut s’y mettre dès maintenant en faisant valoriser ses biodéchets auprès d’une entreprise locale, en circuit-court, en mobilité douce, tout en bénéficiant d’un outil de communication intéressant pour sensibiliser la clientèle. »
Du circuit ultra-court au cœur de Rennes
Après avoir récupéré les biodéchets chez leur client, le vélo-remorque à assistance électrique et sa conductrice file au Jardin des Mille Pas, un jardin pédagogique et coopératif en agroécologie aux abords de Rennes, qui leur troque une parcelle de 1500 m2 en échange de l’utilisation du compost par les maraîchers et les professionnels du lieu. A terme, les 3 fondatrices aimeraient le proposerà la vente en épicerie.
« Nous y avons installé de grands bacs à compost de 600 litres dans lesquels nous vidons les biodéchets » détaille Hélène. « Le processus de fermentation dure environ 3 semaines, avec des apports réguliers de matière sèche : des copeaux de bois fournis par l’entreprise spécialisée dans l’élagage de feuillus ‘A la cime de l’arbre’ basée à Noyal-Chatillon sur Seiche. La montée en température du compost détruit les pesticides et les bactéries, ce qui permet à notre compost d’être utilisable en agriculture biologique. Ensuite, les contours du bac sont enlevés et notre compost, qui a réduit, est retourné sur le sol puis laissé en andain (en tas sur le sol recouvert d’une bâche) ». Les trois amies en connaissent un rayon : elles ont passé leur diplôme de maître-composteur avant de démarrer.
Un territoire fertile, en plein transition écologique
La ville, à taille humaine et plutôt plate, est idéale pour la pratique du vélo. Les pistes cyclables sont nombreuses et larges, et les voies express vélo sont également en plein développement concèdent-elles. « Avoir la nature à deux pas nous a aussi permis de nous implanter aux portes de Rennes pour réaliser notre compost » explique Sophie.
Accompagnées par Elan Créateur (Scop spécialisée dans le soutien à l’entrepreneuriat collectif), Rennes du Compost est désormais incubée par Tag35, incubateur en Economie Sociale et Solidaire (ESS) en Ille-et-Vilaine. Subventionnée par Rennes Métropole dans le cadre de son soutien à l’ESS, l’entreprise est également en contact avec les élus autour des questions relatives aux déchets, à la biodiversité, l’agriculture urbaine et mobilité douce…
Quand on leur demande en quoi Rennes est le bon endroit pour entreprendre, Sophie explique : « Rennes Métropole est un territoire très ouvert à l’action citoyenne, comme en témoigne le budget participatif, et en pleine transition écologique. Nous aimons notre ville et nous souhaitons la voir évoluer positivement. »
Objectif : élargir leurs services aux particuliers
A termes, l’objectif des reines du compost est de mettre en place leur service à destination des particuliers « notamment pour les habitants de l’hypercentre de Rennes, en copropriété, qui n’ont pas accès aux composteurs collectifs mis en place par Rennes Métropole » précise Sophie. En attendant, l’entreprise poursuit sa collaboration avec les commerçants rennais comme le Café Albertine, l’hôtel Le Magic Hall, le restaurant Chez Kub, le café-cantine Les Invisibles, des établissements rennais comme Le Couvent des Jacobins, et bien d’autres encore… Depuis fin mai 2021, les 3 rennaises ont collecté14 tonnes de biodéchets ! Objectif final : une collecte annuelle de 52 tonnes de biodéchets pour passer en Scop (société coopérative) et rentabiliser leur action.
Aujourd’hui, Rennes du Compost compte 2 collaborateurs supplémentaires, Corentin et Karen (en service civique) et a acquis un second vélo-remorque en février 2022.
- En savoir plus sur Rennes du Compost
Pourquoi valoriser les biodéchets en quelques chiffres :
- 18 millions de tonnes/an de biodéchets produits par les ménages français
- 30 % des déchets contenus dans nos poubelles pourraient être réutilisés et compostés
- 2023 : la réglementation européenne rendra obligatoire la gestion séparée des biodéchets pour les particuliers et les professionnels